dimanche 31 mars 2013

Déclaration tardive 7

Bon, je savais qu'à un certain point je prendrais du retard. Comme c'est chose faite, je peux maintenant écrire mes déclarations en rafale, mais tout de même à débit irrégulier.

J'aime les idées en l'air qui retombent.
Quoi? Moi-même je ne suis pas certain de comprendre.
Ce que j'aime relève du croisement de plusieurs circonstances. Quand une idée sort de nulle part et sans raison, on a tous l'habitude de la repousser du revers de la main. Il arrive que cette idée revienne dans une autre situation, à un autre moment. Elle peut même se présenter à une dizaine de reprises avant de sembler réelle.
Qu'elle provienne de soi ou d'un ami, l'idée n'aura pas de valeur tant que tous les éléments ne seront pas en place. Au moment opportun, elle brillera d'autant plus qu'on se rappellera toutes les fois où on l'a oubliée.
Ce que j'essaie de décrire, c'est le mauvais timing de la plupart des bons plans. Il suffit de les garder en mémoire et de les aérer de temps en temps et ils finiront par devenir tentants.
Comme cet ami qui vous offre à plusieurs reprises un emploi qui vous a longtemps pué au nez.
Comme ce restaurant que vous ne vouliez jamais essayer, jusqu'à ce qu'un rendez-vous galant vous y mène.
Comme cette personne avec qui vous avez discuté sporadiquement pendant plus d'un an avant de la rencontrer.
Comme un bon texte qui doit sommeiller longtemps avant de pouvoir être écrit.
Comme une impulsion de changement, prendre cerise au lieu de fraise et s'en délecter.
L'important avec ces idées qui nous rebutent longtemps avant de nous tenter, c'est de ne pas s'y fermer complètement. Oui, elles peuvent sembler saugrenues, voire ridicules. Non, il ne faut pas les suivre lorsqu'elles sont encore repoussantes. Non, il ne faut pas garder son premier jugement négatif lorsque tout converge vers sa réalisation.
Bref, j'aime rester ouvert aux idées sans trop le savoir. J'aime qu'elles m'apparaissent comme des révélations réchauffées. J'aime surtout là où elles m'emmènent.

mardi 26 mars 2013

Déclaration 6

Pourquoi toujours à la dernière minute, genre quelques secondes avant minuit? Ben voyons, comme si j'avais le don d'être à l'heure!

J'aime les rencontres.
Attention, pas toutes les rencontres. Quand mon dos a rencontré un miroir de voiture, puis mon visage a rencontré le banc de neige, je ne jubilais pas trop. Quand un chariot chargé de 2X4 a rencontré mes quatrième et cinquième orteils gauches, je n'ai pas sorti de champagne.
Par contre, vous auriez dû voir mon sourire jusque derrière la tête quand j'ai rencontré mon amie d'enfance après un temps trop long d'absence. Je risque de sourire autant lorsque je rencontrerai son bébé tout neuf cet été.
Il y a aussi la fois où j'ai rencontré mon nouveau moi. Je venais de commencer l'université. J'avais un nouveau meilleur ami et j'ai eu la chance d'en croiser une deuxième. Après un temps, je me suis vu. Pas juste dans un miroir, plutôt vu de l'intérieur. Je me suis serré la main, ne sachant pas que ce surplus d'optimisme, ces pensées en zigzag et ces goûts plus définis et assumés allaient faire partie de moi.
J'ai aussi accumulé les rencontres rapides. Des gens qui passent si vite qu'ils se confondent quelque peu dans mes souvenirs. Des centaines de cafés, des dizaines de soupers et d'innombrables conversations. Certaines m'ont marqué, d'autres auront marqué l'autre et la plupart resteront toujours bof. Dans l'accumulation, les éléments répétitifs se battent entre eux pour finalement s'achever. Heureusement, certains personnages présentaient un peu de substance. Ils m'auront au moins permis de vaincre la timidité des premiers instants, de pouvoir me présenter convenablement sans m'enliser dans une gêne démesurée et handicapante.
Ce que j'aime par-dessus tout des rencontres, c'est qu'elles n'aboutissent jamais là où je le pensais. Je m'en tire tout de même avec des amis, des connaissances, des souvenirs, des informations utiles, des musiques éclectiques et des idées saugrenues. Et surtout, un peu plus grandi.

lundi 25 mars 2013

Déclaration 5

Ce texte de retard me reste encore en tête. Il viendra! Pour l'instant, mon texte du jour.

J'aime le vent.
Et pas juste avoir le vent dans les cheveux lors d'une séance photo ou dans la face en vélo. Le vent qui change les choses.
J'explique:
Chez mes parents, il fait mille degrés Celsius à l'année. Après une heure, mes lentilles cornéennes fusionnent à ma dite cornée et j'ai autant l'impression d'avoir un désert dans les yeux qu'un océan qui sort par les pores de ma peau. Bref, mes parents vivent dans une fournaise. Le meilleur moment de ma visite vient lorsque je leur dis bonsoir pour la quatorzième fois en une heure, donne la bise à ma mère et serre la main de mon père. Car voilà le moment où j'ouvre la porte et cesse de me brûler les bronches. Chaque fois, une bourrasque de fraîcheur m'emporte et je me sens tout léger, le poids du monde s'envole de mes épaules et l'énergie me revient. J'adore mes parents, mais ils me donnent souvent envie d'aller passer le reste de la journée dans un congélateur.
J'aime aussi le vent qui surprend. Au début du printemps, j'ouvre les fenêtres et laisse entrer un léger souffle parfumé de calcium, de lessive gelée, d'humidité et de nouveauté. Cette première ouverture se passe toujours dans un calme revigorant, jusqu'à ce gros coup de vent surprenant. Mes plantes déjà secouées par le pas lourd de la voisine d'en haut se mettent à frémir comme de vraies folles. Tout mon petit appartement se fige et la masse complète de son air renfermé sort en moins d'une seconde. Et puis tout sent le printemps chez moi.
Ça sent le printemps en moi aussi. À certains moments, j'ouvre les fenêtres de ma tête et le vent vient tout balayer. La poussière cognitive envolée, je retrouve les mêmes fondations, les mêmes meubles. J'aime changer de décor, alors je change mon monde interne. Tout ça grâce au coup de vent qui me passe dedans.

dimanche 24 mars 2013

Déclaration 4

J'ai encore un texte en retard, je le sais. Les idées ne manquent pas par contre!

J'aime les vieilles chansons.
Attention, je ne parle pas des tubes de l'été dernier ou des Backstreet Boys. Nenon, les vraies vieilles chansons qui ne jouent presque jamais à la radio. Nina Simone, Otis Redding, Ella Fitzgerald, Tom Jones, Etta James, Barry White, Grace Jones et l'inoubliable Harry Belafonte. Qui? Ben oui, le gars dont les chansons passent dans les scènes les plus marquantes de Beetlejuice. De la musique de 1956, quand même.
Ce que j'aime de ces artistes moins populaires de nos jours relève surtout d'une vibration. Pas dans leur voix,  plutôt celle qu'ils créent lorsqu'on les écoute. On aura beau refaire Feeling Good à toutes les sauces, ça restera toujours la chanson de Nina Simone. Elle la sent jusque dans ses os et la chante jusque dans les miens. Sa voix transporte et donne tout de même directement sur son âme.
Essayez de faire ça avec autotune.
La musique ne découle plus de l'âme de l'artiste, mais d'un conglomérat de grosses têtes doublées de gros portefeuilles. Le succès sert à mesurer la qualité. Comme si l'argent gagné avait plus de valeur que la substance. Ce n'est pas en répétant «baby» avec un effet de voix électronisée qu'on va m'atteindre, mais ça vend.
La belle gueule importe aussi davantage que ce que cette gueule a à partager. Les «chanteurs» en deviennent si obsédés par leur image qu'ils oublient de se dévoiler dans leurs chansons, de travailler le sentiment ou de chercher à traduire une expérience.
Ce que j'aime le plus des vieilles chansons, c'est qu'elles ne se démoderont jamais. Chaque année passée leur ajoute un peu de valeur, comme une antiquité de bon goût. Cent ans après l'enregistrement, j'écouterai Try A Little Tenderness en partageant le moment avec feu Otis Redding. Cent ans plus tard, personne ne partagera quoi que ce soit avec Justin Bieber. Espérons-le!

samedi 23 mars 2013

Déclaration tardive 3

Ma déclaration d'hier se fait attendre et celle d'aujourd'hui ne pourra pas manquer à l'appel. Désolé moi-même pour le retard sur ma propre demande.

J'aime l'inattendu.
J'explique:
Ma vie ressemble souvent à une montagne russe. Certaines situations ressemblent à une maison aux horreurs ou un tourniquet affolant, d'autres au petit manège où on tourne tranquillement dans des soucoupes surdimentionnées. Et comme dans un parc d'attractions, la foule hétéroclite me surprendra toujours.
Quelques personnes connaissent mon nouvel intérêt pour le karaoké (saviez-vous qu'en Japonnais, le terme signifie «orchestre vide»?). Tout a commencé par une fréquentation qui a mal tourné, comme bien d'autres et surtout comme toutes les fois précédentes avec cette même personne. Cinq ou six ans après notre rencontre initiale, sur un coup de tête, nous décidons de visiter une soirée karaoké, juste pour changer d'air et de décor. J'invite un ex, un mordu de chant fort sympathique que je ne voyais pas assez souvent à mon goût.
La fréquentation prend fin, mon ex redevient l'ami qu'il devait être et je me retrouve sur scène avec Tina Turner. Pas la vraie, mais dans ma tête c'était presque pareil et j'ai entamé What's Love Got To Do With It.
Et j'ai rencontré l'organisatrice des soirées karaoké, j'ai atterri chez elle, lors d'une soirée hot dogs et karaoké. J'y ai rencontré de nouvelles personnes, brisé de nouvelles barrières sociales. J'ai chanté comme jamais et découvert des personnalités particulières et attachantes. Je me suis surtout redécouvert, en terrain inconnu.
Et me voilà, un bout de temps plus tard. Je revois ceux et celles qui peuplaient mon ancienne vie, je discute avec des anciens figurants qui prennent de meilleurs rôles dans ma scène perpétuelle.
Ce que j'aime des rencontres inattendues, c'est qu'elles peuvent surgir de n'importe où, même du passé. Connaître une personne à nouveau, c'est rencontrer une nouvelle personne. C'est aussi se rencontrer plus tard, prendre conscience du degré auquel on change.
J'ai changé. J'aime le «toujours plus loin» où mon nouveau moi me mène sans arrêt.
J'aime l'inattendu parce que justement, il ne se fait pas attendre et m'arrive en pleine face sans avertir, sans me laisser le temps de trop penser et de tout distortionner.

jeudi 21 mars 2013

Déclaration 2

Oh oui! Je réussis à tenir un défi personnel pour deux jours consécutifs. Sortez les ballons à l'hélium et les confettis.

Bon, ma déclaration du jour:
J'aime les gens qui ne marchent pas fort.
J'explique: La très grande majorité des gens marchent. Parmi eux, la norme voudrait un pas moyen, de force moyenne, d'amplitude moyenne et de style moyen. Malheureusement, la norme fait plutôt figure d'exception car personne ne marche ainsi.
Prenez ma voisine d'en haut, par exemple. Une chic fille, n'en doutez pas. Elle franchit une distance raisonnable à chaque pas, a du rythme et ne finit pas sa lancée avec une face de «bitch, please». Jusque là tout va bien. Mais à chacun de ces pas presque normaux, elle crée un nid-de-poule. Elle marche fort. Les assiettes tintent, mes plantes se font aller les feuilles et le haut des murs craque presque autant que le plafond (son plancher). Avoir un voisin d'en bas, je suis sûr qu'il l'entendrait.
Prenez le gars avec des lunettes de hipster qui travaille à la brûlerie à côté. Même dans le silence (ce qui arrive rarement dans une brûlerie située à une minute du campus universitaire), ses pas effleurent le sol. Je suis sûr que le plancher ne se rend même pas compte de sa présence tant il fait preuve de délicatesse à son égard. Même sans nervosité, il m'arrive de sursauter lorsque je le vois. Ses enjambées ne dépassent pas l'humainement possible (malgré sa grandeur vertigineuse). Le problème réside dans sa vitesse, elle aussi vertigineuse. Je cligne des yeux et pouf, le voilà à l'autre bout de la salle. Un autre clignement et bam, je renverse presque ma tasse parce qu'il se tient à dix centimètres de moi. Et je ne l'entends jamais arriver.
Des deux, j'aime mieux le gars qui vole comme l'éclair. Il peut causer des malaises cardiaques, mais il n'impose pas sa présence. La fille d'en haut, elle, martèle le monde pour prouver son existence. J'ai beaucoup de difficulté à endurer le pas lourd des gens qui n'arrivent pas à exister en silence. Comme si le fait de bardasser leur donnait plus d'importance, ou que de ne pas signaler leur présence les effaçait.
En plus, ça use les talons.
En plus, ça use les genoux.
En plus, ça use les planchers.
En plus, ça use ma patience qui déjà s'altère autant que le visage de Lindsay Lohan.
Bref, je n'aime pas les gens qui se fient aux oreilles des autres pour vivre. Ceux qui marchent trop fort finiront par défoncer le plancher, ou du moins causer davantage de nids-de-poule. Et pourtant, rien ne leur garantit qu'on les remarque.
J'aime mieux les personnes qui ne marchent pas trop fort. Dans la discrétion, on use moins ses talons et ses genoux et on s'assure d'une approche beaucoup plus délicate.

mercredi 20 mars 2013

Déclaration 1

Ces derniers temps, je me laisse sombrer un peu dans la déprime. Comme cela ne me ressemble pas, j'ai décidé de me forcer à voir au moins un point positif, à chaque jour. Je commence maintenant:

J'aime la simplicité des produits.
J'explique:
Quelques mois plus tôt, j'ai pris mon insomnie par les cornes. À grands coups de musique apaisante (mais bonne, quand même!), d'éclairage tamisé deux heures avant le coucher et de tisane, j'ai mis Morphée de mon côté. Un peu plus et je draguais pour pouvoir tomber dans ses bras. N'empêche que la tisane, ça marche beaucoup mieux que je ne l'espérais.
On m'a conseillé des médicaments imprononçables, des régulateurs du cycle circadien et des remèdes de grand-mère aussi complexes qu'absurdes. Ceux qui me connaissent me savent têtu et réticent à toute médication. J'ai donc levé le nez sur toutes ces solutions à mi-chemin entre le placebo et la bombe chimique.
J'avais besoin d'une solution facile et qui ne m'apporterait ni dépendance, ni mutation, ni facture astronomique. Une tisane. Dans l'allée des infusions, j'ai passé une bonne quinzaine de minutes les sourcils froncés, à chercher le sachet le plus simple et abordable. Mon regard tomba par hasard sur toute la gamme de la Cour Tisane. Mis à part le calembour douteux, cette marque m'a plu par sa présentation sans prétention, son carton recyclé et ses ingrédients parfois uniques. Je bois donc depuis quelques mois une infusion de fleur de camomille. Rien d'autre dans la mixture, rien de chimique dans mon immense tasse.
Depuis, à force de ritualiser mon endormissement, il vient plus vite. Sans avoir eu à débalancer tout mon équilibre métabolique. Comme quoi les produits simples valent souvent mieux que les complexités technologisées et dérivés pharmacologiques. Comme ce bon vieux truc des pommes et oranges pour éviter le rhume. Ou une cuillerée de miel pour calmer une gorge irritée. Ou du temps tout simple pour se remettre d'une épreuve. Ou du repos lorsque l'épuisement frappe.

Bref, je ferai une déclaration d'amour par jour. J'aime les choses simples. Ça contraste bien avec ma personnalité pas trop simple.