mercredi 23 mai 2012

L'impossible paix


Après la guerre des portes, voici l'impossibilité du café tranquille.
Je m'explique.
Depuis le 20 août dernier, je réside tout près d'une panoplie d'établissements scolaires. Pour ainsi dire, 95% de mes voisins sont étudiants et, la plupart du temps, très jeunes. Jeunes de corps, mais surtout jeunes de coeur. Je n'ai pas réussi à avoir un vrai 24h consécutif de calme depuis mon emménagement. Dès que je suis chez moi, je n'ai qu'à m'installer confortablement pour être dérangé par des voisins plus ou moins proches mais surtout extrêmement bruyants et irrespectueux. Je dois donc sortir pour me retrouver seul ou en paix. Amoureux du café, j'opte la plupart du temps pour ce genre d'endroit. Comme ce soir.
Ce soir, j'ai une idée de génie pour un nouveau projet de roman qui remplacerait celui des derniers mois qui s'est vite essoufflé. Tout excité, je me suis installé au salon avec Aurèle, mon précieux portable. Aurèle et moi, nous avons sursauté lorsque le beat d'au-dessus a retenti en faisant résonner le plancher, les murs et la vaisselle sale. J'ai pris une bonne inspiration pour me cloîtrer dans ma bulle, puis j'ai tapé les premiers mots. Ce fut alors au tour des voisines du dessous de tenter d'enterrer la musique du dessus. Les bourdonnements étouffés de toutes parts pourraient rendre fou un fou. Et en me disant cela, l'une des voisines inférieures se met à opérer. Dans le sens de chanter de l'opéra.
Me voilà donc au café le plus proche.
Me voilà donc confortablement installé, avec un grand café corsé à souhait. Bon, peut-être pas si bon, mais quand même mieux qu'un café instantané en poudre qui danse dans sa tasse en raison des voisins sans bon sens.
Me voilà assis depuis deux minutes qu'un vieux monsieur s'installe trois tables plus loin, face à moi. Il fait mine de regarder le dossier spécial (en fait, le centième sur le sujet) sur le conflit étudiant, puis pose son journal après une minute. Et il me fixe.
Parfois, les gens fixent dans le vide et on se retrouve dans leur champ de vision un peu par hasard. Je le fais souvent. D'autres fois, on nous fixe pour de vrai. Son regard à moitié vide n'étant déjà pas très rassurant, je me tourne un peu pour un tête à tête plus intime avec Aurèle.
Le vieux se tourne un peu aussi.
Je décide de l'ignorer, de toute façon je dois écrire. J'ai tellement négligé mon écriture ces dernières semaines, je dois m'y remettre à tout prix.
Je tente un test. Je baîlle. Il baille. Je me gratte le cou, il se gratte le cou. Je rebaille, il rebaille, je me regratte, il se regratte, je me retourne subitement et il prend la même direction.
Fuck. Maudit monsieur qui ne me lâche pas.
Ça lui aura pris une heure avant de se tanner de me fixer. Une heure pendant laquelle j'ai écrit une demie-page d'un premier jet sujet à beaucoup de retravail.
Je gage qu'il a assommé une fille avec la porte en sortant.
Je n'ai peut-être pas écrit en paix, mais au moins j'ai des idées.

2 commentaires:

  1. Te regarder est toujours dé-lec-ta-ble et inspirant. Fixe-toi, ça t'aiderait peut-être...

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  2. Aurèle... Ton portable est si vieux et sage que ça :P?

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