vendredi 6 juillet 2012

Encore du fantasme

Demandez à n'importe qui s'il a des fantasmes, il vous dira non. Personne n'ose en parler librement. Nous considérons les pensées enivrantes comme personnelles, osées, dérangeantes et irréalisables. Ne nous écartons pas de la réalité, tout n'est pas nécessairement bon à dire.
Imaginez maintenant que vous ayez trouvé partenaire pour la réalisation de ce fantasme. Au début, vous n'osez pas y croire. Vous vous regardez dans les yeux pour ensuite détourner le regard, vous riez comme des écolières et aucun n'essaie d'initier le mouvement. Soudain, un déclic. L'un avance timidement, l'autre se garroche dessus et c'est parti.
Vous le refaites. Encore une fois, puis une autre.
Des mois passent. Lorsque vous y pensez, vous rougissez de plaisir et de culpabilité. Par définition, un plaisir coupable, comme une vieille chanson de Marjo. Et comme elle le chante parfois, on n'apprivoise pas les chats sauvages. Votre fantasme ronronne un moment. Il n'attend qu'un signe de négligence pour sortir ses griffes.
Il y a maintenant des années que vous vivez votre fantasme. De moins en moins souvent, ou du moins, vous n'en tirez plus autant de satisfaction. Autrefois un accessoire à votre vie, tout gravite autour à présent. Vous ne ressentez plus ce plaisir intense des débuts. Votre petit délire peut même en être venu à vous écoeurer. Vous ne pouvez plus vous en passer. Chaque fois est une plaie.
Vous tentez de vous en passer. Tout va bien, puis une pensée s'insère dans le moment et voilà la nouvelle habitude de retour au galop. Vous vous en passez de plus en plus longtemps, mais pas moyen d'arriver à l'orgasme tant que le souvenir n'arrive pas. Ou la scène fictive, ou les images, ou les sons voulus, peu importe ce que c'est, arrêtez de m'embêter avec vos histoires tordues. J'ai assez des miennes.
Vous réalisez que vous êtes prisonnier de votre fantasme. Votre chat sauvage vous a pris en otage. Il vous domine et dicte vos gestes futurs. Vous devez lui obéir, sinon pas question de ressentir le moindre plaisir, sinon bonjour les symptômes de manque ou le pathétisme.
Vous voulez vous libérer tout seul. Il faut en moyenne huit essais avant de pouvoir espérer un résultat permanent. Vient ensuite une vague connaissance qui vous dit, du haut de sa sagesse, que les fantasmes sont faits pour meubler vos pensées et non pour être réalisés. Vous l'envoyez promener car il a raison.
Vous vous dites que jamais plus vous ne succomberez à une telle folie.
Vous avez tort.

1 commentaire:

  1. Un des premier texte qu'on lit de toi au «vous» au lieu d'au «je». Intéressant, surtout pour ce sujet là!

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