vendredi 8 novembre 2013

Le grand retour

Où étais-je, ces quatre derniers mois?
Je ne saurais l'expliquer, mais écrire ici ne me semblait plus pertinent. J'ai commencé par me concentrer sur mon sempiternel projet de roman, puis l'intérêt s'est estompé et je me suis retrouvé si loin de mon clavier, si loin de mes pensées habituelles qui se transposaient presque toutes seules sur mon blog. J'ai gribouillé quelques petits textes sans grand intérêt dans mon cahier, noté quelques idées, fui chaque moment où j'aurais dû écrire pour faire autre chose, n'importe quoi pourvu que ça ne soit pas productif.
Et là, le besoin d'écrire me chatouille les doigts depuis quelques jours.
Beaucoup n'écrivent que lorsqu'ils vont mal. Pour ma part, j'ai besoin d'un équilibre précaire. Certaines facettes de ma vie virent à la catastrophe, mais d'autres illuminent mes journées et promettent beaucoup de bonheur supplémentaire.
Je n'ai plus envie de m'éterniser sur un sujet. Bien écrire, c'est dire le plus possible avec le moins de mots possible en recherchant le mot juste, la formulation la plus précise et l'image la plus forte.

Depuis mes dix-huit ans à peu près, je figurais sur un site de rencontre au design horrible et aux usagers souvent douteux. J'y ai rencontré des amis, de bonnes connaissances, des personnages insolites et des pervers sordides. Et aussi quelques rares personnes dont je garde un bon souvenir de nos rendez-vous. Et récemment, quelqu'un de très bien. Pour bien faire les choses et me sentir mieux, j'ai supprimé mon profil. Après sept ans, j'ai avais les doigts tremblants au moment d'appuyer sur supprimer mon profil. À la seconde même où j'ai lâché le bouton de la souris, j'ai senti une tonne d'encombrements s'envoler de mes épaules.
Se savoir présent sur un marché de viande fraîche comme celui-là, ça gruge beaucoup plus d'énergie que je le pensais. J'aurais dû faire ça avant pour me libérer, mais je n'aurais pas connu toutes ces personnes qui ont a leur façon marqué ma vie. J'aime donc croire que j'attendais le bon moment.

Pendant mes courtes études en création littéraire, j'ai eu la chance de suivre un cours avec Anique Poitras. Certains se rappellent tout de suite de La lumière blanche ou Le roman de Sara, d'autres auront besoin d'un comparaison: Vers la fin des années 1990, Le roman de Sara était un bestseller au Québec, un équivalent (en popularité seulement) de Twilight, mais aussi un superbe ouvrage écrit par une écrivaine de grand talent. Et fort sympathique, de surcroît. Bref, je ne suis pas là pour faire la promotion de son oeuvre. Mais si vous ne connaissez pas, vous devez vous y mettre. Dans le cadre de son cours, j'ai eu à écrire une partie d'un roman jeunesse. Mon personnage m'est venu d'une paire de souliers vernis. Ils semblaient sortir d'une autre époque et avoir parcouru le monde d'une petite fille unique. J'ai fixé ces petits bouts d'histoire, puis j'ai fermé les yeux un moment et je les ai imaginé marchant sur une pelouse, puis dans un orphelinat et j'ai ainsi rencontré Ophélie.
L'histoire que m'a inspiré cette enfant spéciale fut, sans vouloir me vanter, l'une de mes plus réussies. Et récemment, j'ai repensé à ce récit, à ma fillette invisible et à celui qui voulait l'adopter, à ses aventures aussi introspectives qu'éclatantes. Certaines idées s'enfouissent si loin qu'on les croyait perdues, puis elle surgissent du néant, revues et améliorées par un inconscient cachottier. On pourrait aussi croire qu'il faut simplement attendre le bon moment pour s'y consacrer à nouveau.

À quelques reprises, j'ai mentionné l'expression «boucler la boucle». Il faut parfois y revenir à deux, trois ou cent-soixante-huit reprises. L'important, c'est de boucler ce qui n'a plus de raison d'être. J'ai donc travaillé trois fois pour le même employeur avant de sentir que le moment était venu de faire mes adieux pour de bon à cette occupation ordinaire qui me revenait toujours. J'ai voulu changer de coupe de cheveux des dizaines de fois pour finir avec exactement la même tête que la fois précédente, puis j'ai changé de coiffeuse et j'ai laissé mon ancien style capillaire loin derrière. Je me suis tourné vers cette personne émotionnellement indisponible des centaines de fois pendant plus de cinq ans, jusqu'à ce que nous réussissions enfin à tout mettre au clair et tuer la tension inutile qui nous liait toujours même lors de nos absences. Mon ex-emploi me paraît déjà si lointain, mon ancienne coupe appartient à un ancien moi, cette vieille relation pleine de silences et de souffrances me semble maintenant inconcevable. Toutes ces histoires m'ont toutefois amené là où je suis. Je devais simplement attendre le bon moment pour les boucler et passer au chapitre suivant.

Je me remets donc au bloggage. Ni pour boucler la boucle, ni pour passer à autre chose. Parce que le besoin d'écrire est de retour. Parce que ça fait du bien d'écrire quelque chose avec un but. Parce que parfois, je vois le monde de travers et tout me semble plus sain une fois écrit.

1 commentaire:

  1. Écrire permet souvent de sentir une tonne d'encombrements s'envoler de ses épaules. Du moins c'est mon impression et c'est pourquoi j'apprécie autant l'écriture. Et c'est quand on la délaisse pour une bonne période et qu'on s'y remet que l'on réalise. C'est du moins ce que je te souhaite de ressentir. Bon retour au bloggage.

    RépondreSupprimer